interview

Treponem Pal
Rencontre avec Marco Neves, un des membres-fondateurs du groupe de metal indus français Treponem Pal qui nous parle de leur 8ème album "Screamers", le premier depuis 2017. Un retour aux sources avec ce nouvel opus aux ambiances musicales différentes, mais toujours très efficaces.

L&T: Salut Marco. 35 ans que Treponem Pal est sur le circuit. Vous êtes les pionniers du Metal Indus en France. Ça fait quoi de savoir qu'on est la référence de tellement d'autres groupes ?
Marco: Salut. En fait, je ne sais pas si on est une référence. Si on est vraiment une référence. Forcément, ça fait 35 ans qu'on est sur le circuit donc oui, on doit sûrement l'être pour certains. Même si je n'aime pas ce côté prétentieux de dire qu'on est une référence. Mais c'est clair qu'on a participé à l'émergence et à l'élaboration de ce style qu'on appelle "métal industriel" , avec des groupes comme "Godflesh", "Ministry" et pas mal d'autres. Et dans les plus anciens Killing Joke évidemment. Mais c'est vrai que pour la France, c'était nouveau, on était un peu un ovni pour l'époque. En fait, on est un groupe de musique bâtarde. (rires)

L&T: Durant tout ce temps, il y a une période que vous avez préféré ou au contraire que vous n'avez pas vraiment aimé ?
Marco: Une période que je n'ai pas aimée ? Pas vraiment non. On est un peu long à la détente surtout ces 10 dernières années, mais c'est parce qu'on cherche toujours à faire le mieux possible. Comme je pense, n'importe quel groupe. Même si ce n'est pas le cas pour tout le monde (rires). Donc, non, on ne peut pas parler de "mauvais moments". Il y a peut-être eu la période en 1997 où j'ai saturé de Treponem. Ou on a eu envie de faire un projet "Reggae Dub" sous le nom de "Elephant System". Mais pour revenir 5 ans après à une base "Noisy Punk Métal indus". Ça nous manquait. Donc non, il n'y a pas de périodes qui m'ont déplu, mais plutôt des périodes plutôt longues effectivement où il fallait trouver l'inspiration.

L&T: Plus qu’un manque d’inspirations, c’était plutôt l'envie de ne pas refaire la même chose que précédemment ?
Marco: Voilà, c'est ça. On essaie de se renouveler tout le temps. Après chacun jugera comment on se renouvelle. Mais on essaie à chaque fois d'apporter des vibrations différentes. Et pour "Screamers", par exemple, il y a trois tendances : un côté "psychédélique punk", un côté "hardcore métal", et bien entendu le côté "rock métal indus" qui fait notre patte. Ce nouvel album est un mélange des trois. Pour moi, c'est important de proposer aux gens des choses différentes. Même si ça reste dans un style qu'on connaît. Mais des choses différentes de ce qu'on a fait déjà. Une musique très intense, très dure quelque part. Quand tu écoutes des groupes, des fois au bout de trois ou quatre morceaux, tu en as marre. Tu en as plein le cul. Et les 7 autres morceaux, c'est la même chose. Donc nous, on s'est dit qu'il faudrait que tout le monde ait envie d'écouter tout l'album complètement. Et que surtout nous-mêmes, on ait également envie de choses différentes sur tout l'album. Je dis tout le temps qu'on fait principalement de la musique pour nous plaire à nous avant tout, et tant mieux si ça plaît aux autres Et si ça ne te plaît pas... Bah tant pis. Pour nous, ça n'a aucune importance. Il faut principalement que la musique nous plaise. Mais bien entendu, on tient à notre public et à notre relation avec lui. Avant tout, on marche à l'instinct.

L&T: On parle de Metal Indus, mais il a beaucoup d'autres références dans votre musique. Je pense au Punk Rock au Metalcore, au Dub, bref à beaucoup d'autres styles. Vous avez su à chaque fois piocher le meilleur de chaque style pour vous renouveler ?
Marco: Oui depuis le début. Depuis la création du groupe, ça a été un melting pot, une compilation de genres différents. Nous, à la base, on venait du punk. Les premiers musiciens qui ont créé le groupe avec moi, Michel Bassin, David Le Brun et Alain Fornasari, on écoutait tout ce qui passait, mais dans des genres différents. Tu vois, on aimait le hip-hop pour son côté baston et revendicatif. On écoutait aussi du métal et du heavy metal comme "Motorhead" ou, dans les groupes actuels par exemple, "Electric Wizard" ou "Orange Goblin". Mais on écoutait aussi du punk hardcore. Et tout ce qui a, ensuite, découlé du punk. Je vais te citer, par exemple, The Cure et l'album "Pornography" qui a un côté très sombre. Et qui nous correspond énormément. Et j'avoue que je kiffe grave cet album je les ai vu à l'époque à l'Olympia et cet album de The Cure est vraiment un must. Et un ovni dans leur carrière. Ce qu'ils ont fait par la suite ça les regarde. (rires)

L&T: Votre nouvel album "Screamers" est annoncé comme un retour aux sources. Pourquoi ce besoin de revenir à la base ? Pour mieux se retrouver ou pouvoir à nouveau repartir sur ces bases-là ?
Marco: Ça s'est fait naturellement en fait. On avait envie de ce côté "patate", très guitares. D'un côté très rythmique, très trans comme “Psychedelic Trip”. Un côté plus martial avec "Screamers" ou pour "The Fall" une tendance au reggae. Et vraiment ça, c'est fait très naturellement. Tout de suite, on s'est dit que ça sonnait comme "Excess and Overdrive" ou "Higher". Et on s'est même dit, du fait du retour de Laurent, qu'on allait rejouer "Rest is a War" qui est un morceau de "Aggravation" le deuxième album et qui est vraiment un morceau phare pour nous, mais qu'on n'a jamais rejoué depuis 25 ans. Et je ne sais même pas pourquoi !(rires)

L&T: Même si vous parlez de "retour aux bases", je trouve que votre son a évolué. Guitares que je trouve plus agressives. Du Dub sur certains titres, mais avec également un groove différent que l'on n'avait pas sur les albums précédents.
Marco: En fait, c'est un groove qui nous est typique si on peut dire. Didier et moi, on adore le Dub, et ses vibrations qui t'amènent à la transe. On retrouve ça dans les trois premiers albums de "Killing Joke". Surtout dans "Révelations". Il y a ce côté dub même si ça reste noir, très noir. Et ça tourne, ça tourne à t'emporter la tête. Donc, pour nous, si tu veux, la base des morceaux doit emporter la tête. Et les guitares viennent finir de t'achever. En ce qui concerne le son, on a bossé avec Jean-Pierre Mathieu qui a travaillé sur les deux albums précédents. Et qui a lui-même évolué dans son travail. Il a énormément travaillé là-dessus et il a mis dans le mille. Il a fait les basses, la programmation des batteries et le mix de l'album.

L&T: On ne va pas parler de "maturité", au bout de 35 ans, elle est là, mais certains titres sont plus posés, plus soft, c'est la sagesse ?
Marco: Disons qu'un morceau comme "Too Late" par exemple où je chuchote est radicalement différent de "Screamers". Alors tu as raison peut-être que l'album est un peu plus posé mais peut-être aussi plus insidieux. L'approche est parfois moins rock, elle n'est pas "métal" qui te rentre dans la gueule. "Psychedelic Trip”, par exemple, est plus posé aussi avec peut-être un côté un peu plus rock n' roll presque pop. Alors, oui, il y a des choses plus posées, mais l'intention est toujours là. (rires)

L&T: Quels thèmes vous développez ?
Marco: La liberté parce que ça reste notre sujet principal. Dans la vidéo "Screamers" par exemple, on défend le droit pour tout le monde. On porte les brassards LGBT. Ensuite, il y a aussi le refus de toute autorité : gouvernement, police, religion. Et parallèlement des trucs qui me touche plus personnellement. Une espèce de schizophrénie que j'ai du mal à contrôler qui fait que je peux passer régulièrement d'un côté très positif à un côté très dark.

L&T: Sans parler d’exutoire, le fait d’écrire te permet d’avancer dans la compréhension de cet état ?
Marco: Oui, c'est ça. C'est un exutoire. Ça me permet d'écrire ce que je ressens. Sur la société, sur l'état du monde actuel qui a régressé sévèrement. Et aussi sur ces sentiments qui peuvent être de peur, de force. Et surtout ça me permet d'aller de l'avant, sans jamais lâcher l'affaire. Voilà un peu toutes ces choses-là.

L&T: C'est grâce ou à cause de la pandémie que vous avez pu le travailler plus profondément avec peut-être plus de recherche au niveau du son et du groove ou bien, vous aviez déjà ça comme idée ?
Marco: Disons qu'on avait fait une première version pendant le confinement. Et pour diverses raisons, on a refait les voix, on a refait les textes, on a rhabillé les morceaux et revus 4 ou 5 titres. Finalement, on était en sortie du confinement avec une nouvelle version de l'album qui tient la route.

L&T: Je suppose que comme pour les précédents, cet album a été pensé pour la scène ?
Marco: Oui. On pense toujours les morceaux pour la scène. C'est-à-dire que "Treponem Pal" est un groupe live. On ne peut pas dire autre chose.

L&T: La scène, c'est votre ADN, c'est là que vous vous sentez le mieux, mais le travail en studio et d'écriture est aussi intéressant ?
Marco: Ah oui, c'est sûr, on y prend goût les années passant. En studio, tu peux tout te permettre. En live, c'est le contraire, tu ne peux plus rien te permettre ! Il faut que ça tape dans le tas. Il faut que tu arrives à convaincre que Treponem est de retour ! Il ne faut jamais décevoir ton public, ça, c'est très important.

L&T: En parlant de scène, le Hellfest va être un grand moment que vous attendez avec impatience, je suppose, comme vos fans ?
Marco: Oui, ce sera la 3e fois qu'on le fait. On l'a fait en 2008, en 2013, il y a déjà 10 ans. Et cette année, on est de retour. C'est toujours un grand moment. Ce qu'est devenu le Hellfest et ce qu'a créé ce mec qu’est Ben Barbaud, c'est assez hallucinant. Et c'est en France. On a le plus gros festival européen de métal. C'est vraiment incroyable.

L&T: Un petit mot sur l'artwork signé Rafto Dilo ?
Marco: Rafto Dilo est un tatoueur basé à Poitiers qui a son salon depuis longtemps qui s'appelle "Utopia Tattoo". Je l'ai rencontré par le biais d'un autre tatoueur qui était son collègue et qui s’appelle "Keuns". "Keuns", on s'est rencontré parce que je n'avais pas de tatouage à l'époque alors que j'ai toujours aimé ça, et je ne m'étais jamais décidé. Et un jour, je suis tombé sur un magazine de tattoos où il y avait une interview de lui et des photos de ce qu'il faisait. Et ça correspondait exactement à ce que j'aimais : une espèce de tatouage japonais. Et moi, je suis principalement branché sur les tatouages japonais Et il m'a tatoué le bras droit et c'est là que j'ai rencontré Rafto Dilo.Il travaillait dans le même salon que lui. On est devenu pote. Keuns a fait la pochette de l'album "Survival Sounds". Le temps passant, on est resté en contact avec Keuns et Rafto. Et en 2020/202, j'ai demandé à Rafto si il voulait bien nous faire la pochette du nouvel album et il a accepté.

L&T: Et pour conclure, une question qui n'a rien à voir avec les autres : quel est le dernier morceau, ou le dernier album que vous avez écouté ?
Marco: Alors j'écoute plein de trucs différents. Mais le tout dernier, c'est Black Angels “Wilderness of Mirrors”. C'est vraiment du rock psychédélique et c'est ce qui me touche le plus.

L&T: Merci Marco pour cette interview.
Marco: Merci à toi.


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L&T Le 12.04.2023
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