interview

Grandma's Ashes

Rencontre avec un trio féminin au nom étrange, "Grandma's Ashes", qui nous parle de leur tout dernier album “Bruxism”. Un album fort, engagé, très féminin, et surtout terriblement efficace.


Pouvez-vous présenter le groupe "Grandma's Ashes" ?

Cela fait maintenant 8 ans que l’on joue toutes les 3 ensembles. A la base, j’avais un projet solo où je faisais un peu de Punk Rock avec des musiciens et musiciennes qui faisaient un peu mon backing band. J’ai rencontré Myriam sur un site internet de rencontres de musiciens, car je cherchais une nouvelle personne pour jouer de la guitare dans le groupe. On a commencé à composer ensemble et on s’est dit que ce serait pas mal de changer le nom du groupe pour repartir de zéro toutes les 2, le temps de trouver un batteur ou une batteuse fixe. On a tourné un peu pendant quelque temps avec des batteurs mais il n'y avait pas trop d'unités de groupes, à part nous 2. Donc on a posé une ultime demande sur ce même site internet, et c’est là qu’on a rencontré Edith. Et donc le groupe s’appelle "Grandma's Ashes" car on cherchait quelque chose qui marque un peu les esprits. On avait un peu le côté “Ashes to Ashes” de Bowie avec ce mot impactant qui est à la fois très dark, très metal et qui insinue pleins de choses plutôt sombres, et ça irait super bien dans un nom de groupe de rock. Et donc "Grandma's Ashes", ça faisait vraiment très drôle et surtout, on savait que tout le monde nous poserait la question.


Pour vous définir musicalement , on a parlé de Stoner, mais vous avez bien vous êtes passées à un autre stade on dirait, avec cet “Alternative Goth Rock”. Qu’est ce donc que ceci ?

Plus maintenant pour le stoner. Même si on garde un peu la lourdeur du stoner. Qu'est ce que toi ça t'évoque ?


Disons que pour moi, Alternative, c’est quelque chose de très large. Goth, je pense que c’est plus pour les tenues que les compos car je pense qu'il n'y a qu’un ou deux morceaux qu’on peut qualifier de Goth. Et rock, ben parce que rock. 

(rire) Disons que comme on a plusieurs références qui vont du rock prog avec notre 1er album, du punk, du goth-rock enfin tout ce qu’on écoute. L’alternatif, c’est plus pour se laisser plus de liberté dans ce qu’on compose. En fait, on prévient dans le fait qu’on aime expérimenté et que dans l'album il peut y avoir une ballade un peu sensuelle que des titres plus explosifs.


On sent bien tout le côté “expérimentation” dans les styles puisqu’on est un peu new wave sur certains morceaux, du grunge, et puis de “rage punk”…

C’est vrai que depuis les débuts du groupe, on s’est laissé une grande liberté. On compose toutes ensemble et en fonction de ce que les unes et les autres avons écouté, on va s’inspirer d'ambiance et de moods qu’on aime parmi nos artistes préférés. Disons qu’on est pas mal alambiqué dans nos productions. Ce qui unit toutes nos chansons, c’est qu’on parle de thèmes assez dark, voir tabou, de mort, d'agression. C’est ça qui est gothique et dark. C’est vraiment ça le côté alternatif, c’est qu’on ne laisse aucune limite.


Ça vous permet d’aller où vous voulez.

Oui c’est ça. Si on veut parler du fleuve de l’enfer par exemple et se dire qu’on va rajouter un gros solo de black metal dessus, on ne va pas s’en priver.


En même temps, il me semble, après écoute des 1ers EP, que vous avez épuré votre jeu. Plus franc, plus direct.

Ah oui, grave (rire). On est revenu plus à l’essentiel (rire). On avait beaucoup de choses à dire, mais on ne se laissait pas forcément toutes les portes ouvertes. On voulait faire toutes les idées qui nous venaient, mais avec la maturité et l’expérience de la scène, on s’est dit qu’il fallait aller à l’essentiel, et pas se perdre. Il fallait qu’on rende notre musique plus accessible. On souhaitait se découvrir et on allait vraiment un peu n'importe où.


On va parler de “Bruxism", votre nouvel album. Déjà pourquoi ce titre "étrange" ?

Eh bien parce qu’on en fait un peu toutes les 3 du bruxisme, parce qu’on grince des dents et quand on a commencé à penser à cet album-là, je suis allé chez le dentiste et j’ai découvert que je devais porter une gouttière et j’en ai parlé aux filles en leur disant “vous vous rendez compte, je me pète les dents du fond tellement je suis stressée et je ne m’en rends même pas compte”. Je suis hyper anxieuse au quotidien et ça abîme considérablement le corps. Et les filles m’ont dit la même chose. Quand est-ce qu’on fait du bruxisme ? On en fait dans les transports, dans les bouchons, quand on est stressée et sans s’en rendre compte. En fait, c’est une anxiété du quotidien qui nous suit tout le temps. Il y a toujours une tension, une pression qui n’est jamais relâchée, même quand on est “relaxée”. C’est vraiment quelque chose qui nous bousille. C’est un album sur ce qui abîme notre corps au quotidien. Sur les éléments de notre vie qu’on subit malgré nous et qui continue à nous abîmer sans qu’on n’est aucune prise dessus. Ce sont des douleurs fantômes qui nous suivent un peu partout. Voilà, l’album est là dessus.


C’est un peu le mal du moment ?

Oui. On pourrait dire le mal du siècle, sauf que ça fait 200 ans que ça dure. (rire)


Vous avez des textes assez forts, quels thèmes vous abordez, en plus ou autres que celui-là ?

On parle de santé mentale, de deuil, comme souvent dans ce type de musique. On parle un peu de romance aussi. Mais de romance par les prismes du retour sur soi, de la toxicité des relations. Du sens des relations humaines que l’on entretient. Pourquoi a-t-on envie d’emprisonner les gens et dans quoi s’emprisonne-t-on nous même ? Dans quelle case se met-on parce que c’est plus “confortable” ? Ou de quelle case on s’extirpe car ce n’est plus confortable ? La seule chanson d’amour qu’il y a dans l’album c'est de vouloir posséder l’autre de manière pas très saine. C’est une chanson qui, de prime abord est mignonne, et c’est une très grande déclaration d’amour, mais au final cela veut que tu m’appartiens.


Les textes sont assez stressants, très dans l'air du temps de ce que l'on trouve dans les grandes métropoles. Est-ce que vous n’avez pas peur d’encore plus stresser les gens ?

Je pense que la musique enjolive un peu le texte, donc, cela passe sûrement beaucoup mieux auprès des gens. Même si le propos reste fort. Je pense que cela rend plus plaisant que la lecture du texte seul. Les retours que l’on a sur les thématiques que l'on aborde c’est plutôt “merci d’en avoir parlé, je me sens moins seule”. Donc il y a un côté plutôt “soulagement” avec une identification du mal que l’on pourrait avoir. Il y a des gens qui n’ont pas forcément les mots pour dire ou décrire ce qu’ils ressentent. Ça peut te purger d’un mal-être que tu ne savais pas identifier. Tu te sens mieux après avoir mis des mots sur ce que tu ressens.


On parle dans votre présentation de références mythologiques, lesquelles ?

C’était surtout sur notre précédent album. Sur ce dernier, on parle un peu du fleuve des enfers, mais, on revient plus dans la réalité, dans le quotidien, c’est beaucoup moins romantique (rire). On évolue avec ce qu’il se passe dans le monde aujourd'hui. Il y a 5 ou 6 ans, faire des textes métaphoriques pour parler de choses intimes, cela nous paraissait normal, mais avec ce qu’il se passe dans la monde, où tout va très vite, tout est violent, tout est très direct, faire des textes sans détour est un moyen d’expression qui nous paraît plus en adéquation avec notre temps.


Comment vous travaillez, qui fait quoi ?

Toutes les 3 ensemble. L’album précédent est né après beaucoup de jam parce qu’on avait le temps de le faire. Pour ce nouvel album, il est plus né de certains moments de jam ensemble, de beaucoup de concertations verbales, et beaucoup d’expérimentations individuelles. On s’est beaucoup envoyées de choses en travaillant chacune chez nous. Cette fois, il était un peu plus à distance car on était aussi pas mal occupées à côté. L’une apportait une matière aux répétitions, on en faisait quelque chose ensemble. Et le soir, ou la semaine suivante, une retravaillait dessus un peu à sa sauce et le remontrait ensuite aux autres aux répétitions. C’est un travail incessant d’aller-retour avec cette fois-ci un peu plus d’expérimentations solo. On a eu aussi la chance d’être dans un studio où on pouvait tout garder, tout travaillait comme on voulait. On pouvait retravailler et enregistrer la batterie, les synthés, les guitares , les voix quand on veut. Et c’est bien de pouvoir rentrer à la maison avec des maquettes de bonnes qualités afin de pouvoir continuer de travailler dessus chez soi. Cela nous a permis de faire un deuxième album plus ou mieux produit avec pleins de petits détails.


L'album est taillé pour le live, vous composez spécifiquement pour la scène, ou pas spécialement ?

On a pris en compte le live, vraiment fort pour pouvoir s’amuser plus sur scène sur cette tournée là sachant que sur l’album précédent, il y avait des moments qui étaient très techniques, très prog, très instrumentaux, où la voix faisait des trucs en même temps que le reste des instruments et ça nous demandait d’être très concentrées sur nos pedal-boards avec beaucoup de changements. En fait, il y avait toujours quelque chose à penser. On était trop concentrées sur nous et pas sur notre public.. On voyait que les gens commençaient à danser ou à bouger et hop, on passait sur une autre phase et du coup, on les perdait. Pour ce nouvel album, on a bien observé notre public pour bien voir ce qui le faisait kiffer dans la fosse. Et nous ce qui nous plaisait à jouer sur scène.


Un retour à l’essentiel.

Oui, c’est totalement ça. On a envie de gâter notre public.


Vers quelles évolutions, musicales ou autres, allez-vous vous orienter dans le futur ? Vous avez déjà une idée ?


Encore plus de violence je pense. Peut être plus metal. En passant peut-être par de l’indus.


Grosse évolution également sur le chant sur cet album.

Oui. On a toujours une palette très large d’expression instrumentales entre les pédales d’effets de Myriam, certains des miennes et le jeu de Edith qui est très complexe, inspiré par de styles différents et beaucoup de percussions. Et je trouve que ce qui manquait, était d'enlever la timidité du chant qui, à la base, était très lyrique, très pop, très clair, et c’est un album où, en tant que chanteuse, j’ai eu envie de profiter plus de la scène, de m’amuser un peu plus, d’avoir plus de moments cathartiques pour moi, sortir de ce chant trop lisse et être beaucoup plus forte et d’exprimer quelque chose de plus violent. Chose que je ne savais pas faire au chant avant. Du coup, j’ai pris des cours de chant saturé pour pouvoir élargir ma palette et j’ai proposé ce chant aux filles qui ont trouvé que ça allait parfaitement. Et donc, ça nous a ouvert des portes pour les prochains albums. Les dates qu’on a jouées avec ce chant saturé, je me suis dit que c’était trop bien et que je n’avais plus envie de faire autres choses (rire). Ça fait trop de bien de crier sur les gens et de les regarder dans les yeux, c’est vraiment génial (rire).


Vous avez déjà de la matière pour un futur album ?

Non. Là, on se concentre pleinement sur cet album. Même si on a quand même quelques idées qui traînent (rire).



https://www.facebook.com/Nanyisnotdead


L&T le 12.11.2025

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