interview

Phil Manca
Rencontre avec Phil Manca pour parler de son dernier album "Layers of Pain". Un nouvel opus plus heavy metal. Même carrément heavy. Du gros son, des guitares plus agressives, une batterie puissante, bref un très bon album à découvrir rapidement.

L&T: Salut Phil. On s'était rencontré en 2021 pour la sortie de l'album "Dancing Spirits" et tu étais, à cette époque, un peu angoissé, on va dire pour la sortie de cet album. Qu'en est-il pour "Layers of Pain", toujours aussi angoissé, ou ça va quand même mieux ?
Phil: Salut.Non, ça va. Je suis moins angoissé. Je suis plus relax. D'ailleurs, c'est la première fois que je parle autant (rire).

L&T: Sur "Dancing Spirits", on sentait déjà le gros potentiel "hard rock" de tes compositions, mais on dirait que tu t'étais un peu retenu, voir restreint à explorer des sons plus "heavy", sur ce troisième album, tu t'es plus lâché, on dirait.
Phil: J'ai lâché les chiens. Bien que je n'ai pas ressenti que je me retenais sur "Dancing Spirits" mais il fallait que ça vienne. Et c'est venu avec cet album-là.

L&T: Le 1er album avait eu des retours plutôt positifs, ça t'a aidé à "surmonter" cette angoisse à te lancer dans les compositions pour toi, de poser des morceaux sur un disque à ton nom ?
Phil: Oui, c'est vrai que ça m'a aidé, je commence à m'habituer, c'est surtout ça (rire). Comme je te disait la dernière fois, ce n'est pas facile de défendre un projet avec ton nom estampillé dessus, surtout quand tu ne l'as jamais fait.

L&T: Et maintenant ça va mieux ?
Phil: Oui, ça va, ça va. (rire)

L&T: Tu travailles toujours tous les instruments lors des compositions comme sur "Dancing Spirits", ou bien, tu as laissé plus de possibilités aux autres musiciens de "créer" aussi. En fait ma question est "est ce que tu as bossé tout seul ou à plusieurs pendant la création" ?
Phil: Non, c'est toujours pareil. Sauf qu'avant il y avait David Jacob qui venait me donner un coup de main sur les lignes de basse, mais là, il était occupé avec Trust. Du coup j'ai tout fait.

L&T: La création, c'est toi. Les autres, après, emmènent un peu ?
Phil: Oui oui bien sûr. Je leur apporte une base, mais je reste quand même le seul compositeur.

L&T: Tu avais des "problèmes" pour écrire des textes sur tes compos, c'est toujours le cas ou bien là aussi, tu as réussi à passer un cap ?
Phil: C'est toujours Frédérique, ma compagne, qui écrit les paroles. Écrire les textes en anglais, même si tu es bilingue, ça ne marche pas bien. Elle, elle est de là-bas, donc elle a la culture, la finesse et la subtilité que nous n'avons pas. Elle trouve tout de suite les trucs "catchy" en anglais, car il n'y a pas que le sens, il y a aussi le son. La plupart des Français qui chantent en anglais, ça ne sonne pas, car ils n'ont pas le truc pour trouver le son. Elle, elle arrive à trouver les leitmotivs qui font, qu'à chaque fois, cela sublime la chanson.

L&T: Et chanter en français ?
Phil: Non. Le Rock'N Roll ce n'est pas fait pour le français (rire). Ça ne marche pas en français. C'est vrai, ça ne sonne pas Rock.

L&T: Les textes ne sont pas hyper joyeux, même plutôt sombres, quels thèmes tu abordes sur cet album ?
Phil: Le merdier général mondial. C'est de pire en pire au niveau de la violence, du mal-être général. Ça se ressent avec les gens dans la rue qui manifestent parce qu'ils ne peuvent plus bouffer. Il y a des gens qui dorment dans la rue, car ils n'ont plus de toit. Des gens qui en assassinent d'autres, car ils pètent un câble.

L&T: Un peu plus que sur l'album précédent. Il faut que tu te lâches. C'est presque une sorte d'exutoire.
Phil: Oui, sur l'album précédent, il n'y avait qu'un ou deux textes vraiment engagés. Mais c'est vrai que je sens plus l'affaire comme ça plutôt que de parler de dragons, de pays imaginaires. Ce n'est pas mon truc tout ça. (rire)

L&T: Les textes sont interprétés par Josselin Jobard. Il y a une réelle complicité entre vous deux. Sa voix se pose parfaitement sur les compos (tant mieux et heureusement, tu me diras.), mais quand tu composes, tu as sa voix en tête ?
Phil: Oui oui, je pense à sa tessiture. J'ai fait des conneries sur le dernier album, car je monte plus haut que lui donc il y a des morceaux où il a fallu qu'il se torde un peu les couilles pour les chanter (rire). Mais en général, j'écris pour lui oui.

L&T: On n'oublie pas non plus Éric Lafont à la batterie, peut être encore plus indispensable sur ce dernier album, et qui donne une sacrée énergie avec un son vraiment très puissant sur toutes les compositions ?
Phil: Oui, c'est vrai. Et je ne sais pas si tu as remarqué, le son de la batterie est un vrai son de batterie. C'est n'est pas du trigg. Il y a une vraie prise de son, comme plus personne ne fait (rire). Même chez les gros comme Ozzy Osborne, ce sont des sons au trigger. La référence de cet album pour la prise de son, c'est le "XIII" de Black Sabbath produit par Rick Rubin. Il expliquait que toutes les prises de sons sont directes sans samples, sans trigg, sans rien. Et c'est ce que je voulais.

L&T: Vous avez fait des prises "One Shot" pour donner cette authenticité aux compositions ?
Phil: Non, là, j'ai eu le temps de le faire cet album. On a eu le temps pour bien travailler le son. On est parti au Canada chez un ami qui est là-bas depuis une vingtaine d'année, qui a un studio et qui produit des groupes locaux. C'est lui qui avait masterisé et mixé le précédent album. Il m'a dit "viens chez moi, comme ça, tu auras tout le temps qu'il faut. On va bien prendre notre temps pour le faire". Et ça me coûtait moins cher d'aller là-bas que de me payer un studio parisien.

L&T: Ça allait être ma question, pourquoi avoir enregistré au Canada et pas en France ?
Phil: C'est parce que là, j'avais le temps et que vraiment ça me coûtait moins cher. Et j'étais avec des gens compétents, que je connaissais.

L&T: C'est vrai que le son de cet album est plus lourd, on est rentré dans du gros heavy, c'est ce que tu recherchais vraiment ?
Phil: Oui oui. C'est le son que je voulais.

L&T: Sur certains titres, on a vraiment l'impression d'être en live. Vous avez fait des prises spéciales, genre "One Shot" ?
Phil: Oui, les prises sont en live. Après, il y a quelques "re-re", mais la batterie est en son direct. Sauf pour les solos de guitare, qui comme l'album précédent, sont mis après.

L&T: Musicalement, tu as, là aussi, à mon avis, passé le cap du "Blues Rock", voir "Hard Rock" des albums précédents pour aller vers des sonorités plus puissantes, je dirais même plus agressives.
Phil: Vu les thèmes qui sont abordés, je ne pouvais pas jouer gentiment. C'est vrai que ça envoie plus. 

L&T: Idem pour tes solos toujours aussi efficaces, j'ai même l'impression qu'ils sont plus longs que sur l'album précédent. On sent que tu t'es fait plaisir.
Phil: Je ne sais pas ça. Je ne vais pas non plus, faire chier le monde avec des solos interminables (rire). Ce n'est pas facile d'improviser sur un répertoire écrit de metal ou de heavy. Ce n'est pas comme le blues où, là, tu peux partir sur de l'impro pendant trois heures si tu veux. Ce n'est pas la même chose. Il y a peut-être des morceaux qui s'y prêtent, peut être plus sur l'album précédent où je pouvais plus facilement rallonger les solos, mais, là, pour ce dernier, je ne pense pas que ce soit très utile.

L&T: Le fait d'avoir joué assez longtemps du Gary Moore fait qu'on retrouve quand même des sonorités, des riffs à lui. Tu penses que lui aussi, comme toi, aurais orienté sa musique vers des sons plus durs, plus heavy ?
Phil: C'est ce qu'il avait dit. Il voulait refaire du hard rock celtique comme il avait fait à un moment donné. Mais oui, je pense qu'il serait allé vers un son plus dur, plus heavy.

L&T: Toujours fidèle à ta "Les Paul". Ou bien jouer sur d'autres guitares ne te posent pas de problèmes ?
Phil: Oui oui. J'ai tout fait à la "Les Paul" sauf un morceau, je crois. Comme cette fois-ci, j'avais du temps, j'ai fait pas mal d'overdubs donc en général, il y a deux rythmiques. Une est faite avec le "Les Paul" et l'autre avec une "Les Paul Junior". Je ne voulais pas faire deux fois la même chose, donc ça complétait la palette sonore. Mais sinon oui, c'est de la Gibson.

L&T: J'ai lu pas mal d'articles anglais, où on parle de toi comme d'un "guitar heroe", ça te fait quoi, tu te sens l'âme d'un "guitar heroe" ?
Phil: Ah oui, c'est un média brésilien qui avait écrit ça. Donc, non (rire), je ne me sens pas du tout l'âme d'un guitar hero. Un guitar heroe, c'est Satriani, ou Steve Vai où tout est basé sur la guitare. Moi, ce n'est pas ça.

L&T: Sur scène, lorsque je t'avais vu, vous étiez quatre, c'est le même line-up que l'on va retrouver ?
Phil: Non. On ne sera plus que trois.

L&T: Un "Power Trio".
Phil: C'est ça.

L&T: "Crying For Freedom" était, pour toi, le titre le plus représentatif de ton album précédent. Pour "Layers of Pain", ce serait lequel ?
Phil: Alors là, c'est plus compliqué, car il y en a plusieurs qui m'interpellent. "The Race Is On" que j'aime beaucoup, mais "Angel Don't Cry" que j'aime aussi.

L&T: Oui, en fait, tu vas toutes les aimer, mais celle qui dit "Ma nouvelle patte, c'est ça" ?
Phil: Alors le premier morceau "The Race Is On". Ça donne tout de suite la couleur de l'album.

L&T: Est ce que maintenant, tu es moins "stressé" à te retrouver sur les devants de la scène, au sens propre comme au figuré, car avant, tu n'aimais pas trop ça, être devant.
Phil: Je te le dirais quand on y sera (rire). Mais, là, je ne vais pas avoir le choix, il faudra y aller. Je vais m'y préparer. Je ne pense pas que je vais sortir de grands discours entre les chansons (rire). Ce n'est pas vraiment mon truc. Après, j'ai été voir Alice Cooper, il ne parle pas du tout !! Par contre, il faut enchaîner. Il ne faut pas mettre trois plombes entre chaque morceau pour accorder ta guitare. Moi, j'aime bien ce concept-là d'enchaîner, de travailler des enchaînements de morceaux. Comme ça, tu parles une fois dix ou quinze minutes après le début et ça va (rire).

L&T: On va retrouver quoi sur un concert de Phil Manca ? Beaucoup du dernier opus, un peu de l'ancien, et... un peu de Gary Moore ?
Phil: Oui beaucoup du dernier. Et non pas de Gary Moore. Je ne vais pas faire des covers de Gary Moore sur un concert à moi. Ou alors après le rappel, après avoir déjà joué toutes mes chansons (rire). Avec peut-être quelques titres de l'album précédent. Par exemple, sur cet album, il y a une reprise... De moi (rire).

L&T: Dernière question rituelle pour finir : quel est le dernier morceau ou le dernier album que tu as écouté ?
Phil: Alors c'est un truc qui n'a rien à voir avec le métal, le groupe s'appelle "The Lemon Twigs", ce sont deux italo-américains qui composent des trucs que j'adore.

L&T: La dernière fois, tu m'as dit "The Struts" si je me souviens bien.
Phil: Ah The Struts j'en suis revenu. Leur carrière américaine n'est pas terrible terrible.

L&T: Merci Phil.
Phil: Merci à toi.


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L&T Le 08.07.2023
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